محمّد ملص والمهرجان
1 août 2019Le FIFAK entre Triomphe et Gueule de Bois ! ACTE 1
2 août 20195 lettres résument-elles 55 ans de rêve, d’imaginaire, de lutte et d’abnégation.
FIFAK n’est pas le titre d’un film en mal de générique, ni le code d’un soldat inconnu. C’est tout simplement le code secret des fous du cinéma qui refusent les sentiers battus.
Si FIFAK, comme les inscriptions romaines gravées sur les stèles du fort de Kélibia. Perdaient leurs voyelles il n’en reste pas moins que F et K. F comme Film et Festival et K comme Kélibia, des lettres en or inscrites sur la muraille de la mémoire de tout cinéaste non professionnel… Un cinéaste qui croit à la liberté, honnit toute censure ; transgressif, mais lucide ; dénonciateur et pas délateur et couvre de honte la dépendance envers le capital.
Un cinéma-rêve, un cinéma-lutte, cinéma d’innovation et de recherche, de déconstruction et de dépassement. Un cinéma de distinction qui assume ses failles, sa pauvreté materielle et sa richesse créative. Tout a commencé comme un étonnement devant cette petite machine mécanique : la Ariflex 16 m/m et les petites bobines de 30 mètres. Machine chère aux mains du pouvoir et des pellicules onéreuses au sein des capitalistes et pourtant la machine fut détournée et la pellicule devient onirique…
Des jeunes qui voulaient apprendre le cinéma en école buissonnière s’organisent en association et tournent leurs propres petits films dont la durée ne dépassait pas quelques minutes… D’abord en essai d’où le titre Amateur, loin de tout attribut péjoratif amateur se conjugue en modestie et discrétion, alors il fallait montrer, voir et se voir ensemble. Un rendezvous, une rencontre et c’est Kélibia qui fut choisie il y a 55 ans pour qu’un camping, un pique-nique visuel devienne d’année en année un Festival qui a traversé les monts et les vallées des changements sociaux du pays.
Le nom est passé par plusieurs versions. La technique a évolué. Plus le pays passait par des crises, plus le cinéma amateur redoublait d’exigence et de radicalisation. Plus la technique changeait, plus les objectifs s’éclaircissement pour répondre à cette belle phrase de Youssef Ben Youssef : » il n ‘ y a pas plus objectif qu’un objectif ». Chaque décade a apporté au FIFAK une nouvelle forme de maturité. Mais la ligne, la plateforme, est restée solide pour se transformer en rampe de lancement de nouveaux cinéastes…
Politisé le FIFAK ? Oui, mais dans la noblesse du mot : rêve de justice sociale, collégialité et démocratie interne et surtout volontariat. Ce n’est pas l’opéra de quat ‘sous de Brecht, mais un presque no budget Festival. Qu’un festival qui demeure jeune à l’orée de la vieillesse, en fait l’âge de raison, cela relève du miracle tunisien. Peut-on citer les milliers des films, les rencontres, les débats, les joies et déceptions ? Une histoire à écrire, une épopée à continuer et un rêve à exaucer chaque jour pour que la quintessence de l’imaginaire soit jugée et jaugée chaque année ici à Kélibia.
Cette année n’est pas la fin d’un cycle, mais un nouveau tournant. À Kélibia que mille regards fleurissent et que la liberté d’expression continue à rugir, car nous le voulons libre avant qu’il soit cinéma.
Abdelkarim GABOUS | Bulletin du FIFAK | 01 – 08 – 2019